vendredi 7 octobre 2011

RENCONTRE AVEC MERE TERESA


Entres toutes mes rencontres, une des plus belles sans aucun doute. La religieuse de Calcutta était véritablement un personnage mythique. Loin d’être inaccessible son entourage la protège parfois afin qu’elle ne soit pas étouffée par un excès d’amour. Nos relations ont débuté d’une manière inhabituelle.
J’avais entrepris de réaliser un reportage sur les bénévoles de Mère Teresa, ces jeunes femmes qui allaient dans le  mouroir de Calcutta, afin de se dévouer pour tous ces miséreux à l’agonie.
Une femme exceptionnelle, devenue une de ses amies, Nicole Dulaar s’occupait des aspirantes bénévoles françaises : elle m’a ouvert les portes de cet univers où régnait l’amour de l’autre et la charité. Un matin elle m’a téléphoné : Mère Teresa devait arriver à Paris dans la soirée. Si je souhaitais la photographier, échanger quelques mots avec la religieuse, rendez-vous à 17 heures à Roissy. Je l’emmène dans ma voiture, comme toujours. ajouta-t-elle.

Une jeune personne qui partageait ma vie, Macha, souhaitait approcher la religieuse. Handicapée par la poliomyélite, très croyante, toute lumière, elle venait de vivre un drame abominable : sa famille adoptive venait d’être assassinée par un fou et la malheureuse n’avait plus de larmes pour pleurer. Rencontrer ‘’ Mother’’ disait Madame Dulaar pourrait lui mettre un peu de baume au cœur.
- Je dois lui téléphoner ce soir, je lui parlerai de toi. Elle apprendra le malheur qui te frappe…
A Roissy, nous avons retrouvé Nicole Dulaar. Elle nous a dit de l’attendre devant la sortie que devait emprunter Mother Teresa. Déjà l’épouse de l’ambassadeur des Indes à Paris plus une brochette de personnalités, connues de notre amie, venaient d’arriver à l’aéroport. Elles  se dirigèrent bientôt vers les salons VIP réservés au gratin. L’avion de Calcutta (ou de Bombay ?) avait une petite heure de retard.
Notre amie qui les avait accompagné, ‘’sous douane’’, est revenue au moment où les haut-parleurs annonçaient l’atterrissage de l’avion que nous attendions.
- Mère Teresa va arriver. Un bon prétexte pour vous entretenir avec elle : dîtes-lui que nous sommes amis et que je vais arriver tout de suite avec ma voiture, devant la porte 17, celle qui est la plus proche de vous, par laquelle elle devra sortir pour me rejoindre.
L’avion de Mère Teresa s’était posé depuis une petite demi-heure quand une hôtesse d’Air–France s’approcha de ma compagne qui était assise à côté de moi. Facilement reconnaissable grâce à ses cannes :
-  Madame. Venez avec moi : Mère Teresa vous attend.
 Je restais seul et, un quart d’heure plus tard, au moment où revenait Nicole Dulaar apparut la religieuse, dans l’humble robe bleue et blanche, emblématique qu'elle avait conçu pour son ordre,  escortée de plusieurs dames, dont certaines en sari. Derrière elle, radieuse, marchait Macha.
Celle-ci me raconta les minutes de bonheur qu’elle venait de vivre et qui plus tard lui paraissaient un rêve.
- Lorsque je suis arrivé auprès d’elle, elle s’est agenouillée devant moi, a touché ma jambe gauche paralysée, m’a embrassé sur les deux joues, m’a donné quelques médailles. Elle a voulu que j’en accroche une à la chaînette que je porte autour du cou, m’a même aidée à ouvrir le minuscule fermoir ; une telle simplicité m’a stupéfiée…
Je me suis approché de Mère Teresa, je lui ai touché le bras, embrassé sa main : j’ai eu l’impression d’une présence divine. Bien longtemps auparavant, j’ai côtoyé à plusieurs reprises l’ayatollah Khomeini à Nauphle le Château : à chaque fois une force magnétique prodigieuse me repoussait : j’avais l’impression d’approcher le diable. Quand il me fixait, car nous nous sommes vus à plusieurs reprises, j’étais transpercé par un rayon laser…à l’incroyable énergie, au stupéfiant magnétisme
Ensuite, entourés, encerclés par une meute de photographes, les flashs crépitaient.  Nous nous somme dirigés vers la voiture de Nicole. Elle s’est installée à sa droite, est ressortie lorsqu’elle a vu dans la foule agglutinée Macha qu’elle cherchait des yeux, l’a prise dans ses bras et l’a embrassée en lui murmurant six mots qu’elle seule a entendu :
- Tu es un don de Dieu !
Par la suite nous avons revu à plusieurs reprises la religieuse. La dernière fois à Rome, dans son couvent, proche du  Colisée, où je l’ai beaucoup photographiée. Elle s’apprêtait à partir pour l’Albanie. Un prêtre qui grâce à elle allait retrouver son pays et qui pleurait de  joie  Macha, qu’elle fit asseoir auprès d’elle à l’aéroport de Ciampino, a réalisé la photo  faite au couvent un peu plus tôt, juste avant son départ : j’ai ma main droite  sur l’épaule de Mother. Ce fut notre dernière rencontre.

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